La Grèce

La Grèce

Selon la tradition, on fait naître le théâtre grec, et donc la tragédie, avec Eschyle, au début du Ve siècle avant J.-C.

Mélange du culte de Dionysos et de légendes populaires (légendes, histoire des grandes familles royales (Atrides, Labdacides), le théâtre grec est à la fois cultuel et culturel. Ce n’est pas un théâtre populaire, mais un théâtre civique, au service de la cité (le théâtre est roi à Athènes.)

Le Ve siècle, c’est la naissance du théâtre et de la tragédie avec Eschyle, le théâtre civique. Il est né de la démocratie, enfin une soit disant  « démocratie » parce que les 500 000 habitants sont répartis ainsi : 40 000 sont libres (riches ou pauvres), 160 000 femmes et enfants n’ayant aucune participation à la vie civique et 300 000 esclaves n’ayant aucun droit. Les débats civiques et le théâtre ne concernent pas les femmes. Elles peuvent être tolérées dans l’amphithéâtre mais au dernier rang du haut…
A Athènes (5e siècle avant J.-C.), le théâtre est financé par les magistrats (archontes), dont certains sont chorèges (‘producteurs’ d’un chœur). Le théâtre est divertissement mais aussi enseignement. On va jusqu’à payer les indigents pour qu’ils assistent aux représentations.

Dans la tragédie grecque à son apogée, il y a  trois acteurs : toujours des hommes, toujours masqués. Au VIe siècle avant J.-C., l’auteur (changeant de robe, de masque, de voix) incarne tous les rôles. L’acteur, chaussé de cothurnes (grosses selles surmontées de brodequins lacés), matelassé sous de longues robes, porte un masque porte-voix, ce qui lui donne une voix surhumaine pour psalmodier son texte.

Le comédien est anonyme. Il ne prête pas ses traits au personnage qu’il joue (un dieu, un demi-dieu, un roi…). L’imagination des spectateurs est exaltée car ils ne peuvent se mettre à la place de tels personnages ‘extra-terrestres’.

A côté de l’acteur, un chœur composé de 15 (ici, ce chiffre a évolué au fil du temps) garçons, est en quelque sorte un ‘personnage collectif’, véritable trait d’union entre les spectateurs et les acteurs (les membres du chœur portent parfois un petit masque, mais le plus souvent, sont maquillés et portent des postiches). Le chœur représente la cité, les gens du peuple qui ‘jugent, conseillent, avertissent, questionnent’ les acteurs (personnage, ou ‘la cité’).

La tragédie – Trois grands auteurs

Eschyle, Sophocle, Euripide. Tous trois Athéniens du Ve siècle avant J.-C., ils portent à la scène les poèmes d’Homère relatant des faits semi-légendaires de l’histoire de la Grèce. Ce théâtre n’est pas un théâtre d’actualité. La tragédie est la mère de l’Histoire (on recherche la vérité historique) et de la Philosophie (on doute (le chœur) de tout, on questionne).

Eschyle (- 525 à – 456)
Contemporain de Sophocle. C’est un homme de spectacle complet. Il invente le deuxième acteur, le costume flottant, le masque à fond blanc, fixe les règles de la mise en scène…C’est aussi un grand acteur (Oeuvres : Les Perses , L’Orestie…)

Sophocle (- 496 à – 406)
Grand homme de théâtre mais acteur médiocre. Auteur fécond et très admiré. S’intéresse aux questions de la violence, de la légitimité du pouvoir, aux conflits entre les dieux et les hommes, bref : au destin individuel de l’homme. Le chœur, témoin civique, perd de l’importance (Antigone, Œdipe-Roi…)

Euripide  (- 480 à – 406)
Il n’est pas acteur, mais bien ‘homme de lettres’. Il assiste à la chute d’Athènes. Contestataire, auteur de fin de régime, il déteste la violence et a pitié des faibles.

C’est le grand classique des tragédiens grecs, réaliste, voulant rendre la complexité de la vie. Avec lui, les acteurs ne sont plus matelassés, ils s’assoient sur scène, les masques deviennent réalistes et le chœur (témoin civique) s’efface. (Alceste, Médée, Les Troyennes, Les Bacchantes). Est de loin le plus célèbre des tragédiens et avant Sophocle, reste l’auteur grec ancien le plus adapté encore aujourd’hui.

L’essence de la tragédie est dans le destin (la fatalité = en grec, le mot erreur), la catharsis (la terreur, l’angoisse et la vengeance des dieux – les horreurs d’un malheur, d’une malédiction –  la compassion pour les victimes – et la ‘purgation’, pour prévenir les hommes qu’il faut modérer nos actes qui, passionnés, pourraient nous mener à commettre l’erreur fatale que susciterait la tragédie, l’horreur de la foudre des dieux déshonorés. Le spectateur vit, voit la situation par procuration mais ne subit pas de condamnation. Alors la catharsis a-t-elle vraiment effet ?

Franca Rame, dans Le gai savoir de l’acteur, Dario Fo, p. 284,  évoque le rôle des femmes dans les bacchanales.

« Aux temps primitifs, en Attique et chez les Achéens, les femmes sortaient de leurs maisons toutes ensemble, pour aller monter des spectacles orgiaques dans des lieux sacrés dont l’accès était sévèrement interdit aux hommes. Il est vrai, comme le raconte Euripide dans Les Bacchantes, que celui qui malencontreusement s’égarait parmi elles, risquait d’être dévoré vif par ces folles déchaînées. Les femmes de Bali, m’a raconté Ron Jenkins, ont encore aujourd’hui la coutume, comme les bacchantes, de se retirer à l’écart lors de certaines fêtes, et de représenter des histoires grotesques où elles se moquent férocement des hommes en faisant jouer leur caricature par des actrices travesties. Il faut répéter que les premiers êtres humains comiques, dans les premiers récits mythologiques, furent des femmes et que le spectacle comique était un acte fondamental dans tous les rites initiatiques : pour rendre sacré le lieu de la fête, le premier à entrer dans l’espace rituel était le personnage comique, et avant lui la femme comique. C’est seulement quand ils avaient réussi à déchaîner l’hilarité du public que le dieu consentait à consacrer le lieu. »

A côté de la tragédie, existent, dans la Grèce antique, d’autres formes de théâtre :

Le  drame satyrique

Le drame satyrique est une sorte de tragédie traitée de façon bouffonne (facéties du chœur des satyres = sortes de clowns). D’authentiques héros tragiques sont confrontés à des monstres et à des bouffons (Le Cyclope d’Euripide est le seul drame satyrique qui nous soit parvenu.Théâtre féérique, comique, empreint d’illusions, de sauvages, de petits démons, de satyres.

La comédie ancienne

Née de la fête dionysiaque, mais moins structurée que la tragédie. A Athènes, la comédie est partout dans la rue (marchands, bonimenteurs, farceurs professionnels pullulent. Vers -486, elle est institutionnalisée avec un premier concours.

Aristophane est le grand auteur comique satirique (-446 à 385 ?)
Son but : défendre la cité contre tous les abus politiques, culturels, défendre les petites gens contre les ‘décadents’. (Lysistrata, L’assemblée des Femmes, etc.)

Les acteurs : non limités à trois mais pas très nombreux quand même. Matelassés (gros derrières, gros ventres), sexes en cuir démesurés, hauts sur pattes, masqués gros nez, grande bouche…, souvent avec l’aspect d’un animal. Chœur composé de 24 choristes et du coryphée.

La comédie nouvelle (IVe – IIIe siècle – Ménandre)

Un demi-siècle après Aristophane, la tragédie disparaît peu à peu ; avec l’auteur à la mode, Ménandre (-342 à -292), le théâtre farcesque se reconvertit en pièces bourgeoises en cinq actes traitant de la morale bourgeoise (argent, amour, filles de bonne famille…). Plus d’allusion politique, d’obscène, de satyres, plus de chœur ( la voix du peuple). C’est plutôt ‘Vive l’argent, l’amour’ ( parce qu’il faut bien que ça se passe) et l’image tyrannique de la femme mégère. C’est donc une peinture réaliste des mœurs bourgeoises de son époque. Avec des personnages types qui se sont perpétués à travers les âges (Harpagon, Figaro…).

Les comédiens (toujours des hommes) se professionnalisent. Les théâtres sont en pierre.

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